Résumé :
  • Dans sa totalité, cet article, illustre l'analogie entre les contextes médecine et entreprise, distingue longuement deux diagnostics établis au sein des relations médecin-patient et manager-collaborateur et met l'accent sur les retardateurs ou freins du changement.
  • D'une part, le diagnostic de crise renvoie à la présence de deux caractéristiques - apparition brutale, court terme - et disparaît au moyen d'un traitement. D'autre part, le diagnostic de chronicité, s'installe dès lors que les signes de la crise traitée persistent. Ses symptômes, concomitants, spécifiques, sont le caractère silencieux et le long terme.
  • Dépasser la «résistance au changement» relève de la stratégie de la gestion de la chronicité et non pas de celle de crise. Autrement-dit, le changement qui réfère à une rupture de l'ancien équilibre, c'est-à-dire quand «tout allait bien», conduit nécessairement vers une démarche d'accompagnement sur la durée afin de comprendre, accepter la nouvelle situation et trouver ainsi de nouveaux repères de vie privée et/ou professionnelles. Ce sont les cas du diabète, maladie chronique et de la fusion-acquisition en entreprise. En outre, il est important de noter que l'incertitude, ou «zones de gris» sont inhérentes au processus complexe du changement. En revanche, ces notions sont quasi-inexistantes durant le phénomène de crise qui nécessite un bref et efficace traitement. Le retour à l'ancien équilibre se fait sans entrave. Ceci concerne la grippe, affection aiguë et l'adoption d'un nouvel organigramme en société.
  • Face à cette fracture, un incontournable travail de deuil est à faire : «deuil de la santé, deuil de l'ancienne organisation». Durant ce travail, les inéluctables étapes ci-après sont différentes pour chaque être humain tant au niveau de l'ordre que celui de la durée. Il s'agit des 5 phases suivantes : choc et déni, révolte et colère, marchandage, réflexion et retour sur soi, acceptation (cf. tableau). Il est rare de pouvoir en faire l'économie et elles sont donc à prendre sérieusement en compte du côté du médecin-manager. En effet, dès que ces derniers auront l'habileté de les pointer avec bienveillance, alors les patients et collaborateurs adapteront leur mode de vie privée ou professionnelle à la nouvelle situation qu'ils n'ont pas voulue. Au contraire, si les médecins et managers ignorent ces phases alors ils risquent d'adopter de néfastes attitudes et par là-même, de retarder le processus de changement et de maintenir les patients et collaborateurs dans une situation très inconfortable.
  • D'une manière générale, force est de constater que le médecin accepte, en perdant de son pouvoir, de déléguer plus facilement au patient la prise en charge de sa maladie tandis que le manager souhaite encore souvent maintenir une relation «parent-enfant» AT.
  • Enfin, des croyances individuelles bien ancrées représentent un des principaux freins au changement. Il est donc essentiel de parvenir à les identifier à tous les niveaux. Seulement après, les dirigeants pourront définir une stratégie et mettre en oeuuvre les moyens et les outils nécessaires pour démultiplier des actions sur une large échelle.
  • Contexte Médecine
    de l'être humain
    Entreprise
    avec les êtres humains
    Diagnostic
    « Crise » Crise de santé (grippe...) Crise dans l'entreprise :
    (réduction des effectifs, organigramme, ...)
    Apparition brutale +
    court terme
    remède court terme « OK »AT
    « Chronicité » Diabète Fusion-acquisition, privatisation, ...
    caractère silencieux... +
    long terme
    Démarche d'accompagnement sur la durée
    -> « OK » AT
    Travail de deuil : Choc et déni
    Révolte et colère (« Pourquoi moi ? »)
    Marchandage
    Réflexion et retour sur soi
    Acceptation
    AT : expression provenant de l'analyse transactionnelle
    NB : Winicki cite les références d'Elisabeth Kübler-Ross (1978, «Les derniers instants de la vie», Editions Labor et Fides) notamment les étapes suivantes : le déni / la rupture (comme première ligne de défense), la révolte / la colère («Pourquoi moi ?»), le marchandage, la dépression / la réflexion - le retour sur soi, l'acceptation du changement.
    Virginie HINGRE