Résumé :
  • Tout au long de cet article, la notion d'« accompagnement » s'entend du point de vue des « pratiques sociales » au sens large où dans un premier temps seront explorées sept rubriques auxquelles s'adjoindront des termes voisins de langues anglosaxone et française (cf le tableau « A » suivant). Un second temps mettra en lumière la relation intersubjective, la clinique, la demande, la lecture multiréférentielle et l'approche pédagogique non directive et centrée sur l'autre, le sujet.
  • Tableau « A » : Palette des emplois du terme « accompagnement »
    Sept domaines
    (inscrits dans les pratiques sociales)
  • musique
  • éducatif, scolaire et universitaire (notions de « trajectoire » et « cheminement »),
  • la formation professionnelle et de l'éducation continue des adultes,
  • sportif,
  • clinique,
  • juridique et social,
  • solidarités et de la coopération internationale.
  • Termes voisins de celui de « accompagnement » très influencés par la culture américaine du management :
  • coaching : individualisé (fréquent) , groupal (rare),
  • counselling : surtout individualisé,
  • consulting
  • employés dans la langue française :
  • « tuteur » : toujours individualisé (établissements de l'Education Nationale...),
  • « intervention » psychosociologique ou institutionnelle : portant le plus souvent sur des groupes ou des communautés, parfois plus individualisée et intéresse les secteurs marchand et non marchand
  • Etymologie « accompagner » semble être formé, à partir de compagnon (du latin cum et panis : pain) induisant l'idée de partager quelque chose d'essentiel. La même idée se trouve dans la notion de partenaire (partager, prendre sa part).
  • De la compréhension du terme « accompagnement » et précisément dans le temps et l'histoire vécus, se dégagent les idées maîtresses suivantes.
  • La temporalité-durée constitue une forme de processus et l'espace référe au cheminement commun, le « bout de route » fait ensemble. Bien que le « passage » de Winnicott ou la « passe » de Lacan supposent progrès et changement de territoire, ils ne permettent pas forcément de découvrir le changement attendu dont il est question ici. Ce dernier implique une initiation-réitération, une altération, une maturation et une appropriation qui sont essentiellement temporelles.
  • L'accompagnement suppose une relation intersubjective, entre des personnes (ordre du transfert au sens psychanalytique du terme) et non entre des objets (ordre du transport).
  • Hormis les formes institutionnalisées, instrumentalisées d'accompagnement, il en existe d'autres plus spontanées, appelées démarches d'accompagnement. Elles sont constituées d'un ensemble de comportements et de conduites étayés par des savoirs, théoriques et pratiques, aux fins d'une évolution des relations intersubjectives. La démarche d'accompagnement devrait comprendre une position éthique d'autant plus qu'elle sera professionnelle en convoquant différents systèmes de valeurs. En somme, il s'agirait d'une réciprocité entre des partenaires reconnus comme « autres ». D'où la reconnaissance mutuelle des limites réciproques qui permettra de repérer et de distinguer entre certaines formes d'accompagnement plus autoritaires, plus modélisantes (tutorat, conditionnement) et d'autres plus respectueuses de l'altérité et de ses potentialités d'originalité et de création (clinique, psychothérapie, éducation).
  • En outre, par le biais de certaines caractéristiques (temporalité, relation, intersubjectivité, réciprocité), sera abordée au plus juste la notion de clinique, originellement médicale. Elle s'est, aujourd'hui, largement étendue aux sciences humaines et sociales pour désigner la situation, le terrain, et le type de relation professionnelle, temporelle, intersubjective en gardant toujours à l'esprit l'altérité et la réciprocité dans les échanges. C'est ainsi que des services marchands ou non pourront être apportés par certaines personnes à d'autres qui en auront exprimé la demande. Par ailleurs, selon Michel Foucault, l'écoute, d'ordre temporel, s'adjoint à la dimension première à laquelle a été longtemps réduite la clinique: l'observation, d'ordre spatial. Compte tenu de ses différents aspects, la notion d'accompagnement bénéficiera utilement d'une lecture multiréférentielle.
  • Contrairement aux comportements techniques et professionnels répondant à des besoins spécifiques et correspondant, le plus souvent, à des dysfonctionnements locaux, l'intentionnalité même de l'accompagnement nous renvoie à une problématique plus générale de l'éducation et des pratiques pédagogiques. De ces dernières, sera retenue l'approche pédagogique non directive, centrée sur la personne de l'apprenant et d'où se dégagent deux choses importantes. D'une part, l'autre, le sujet, le bénéficiaire, le client est seul capable de choisir où il veut aller et comment il entend s'y prendre. D'autre part, le changement majeur d'optique pour l'intervenant, se mettant essentiellement à l'écoute de l'autre, réside dans l'acceptation du fait que l'autre est auteur, acteur et metteur en scène de ses actes avec des affectations qui l'affecteront toujours utilement.
  • Virginie HINGRE